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Voyage en Serbie (1)

Lundi 16 juillet, bienvenue en Serbie …

Mon seul et unique visa, en dix ans de passeport...La Serbie c’est un peu plus de 7 millions d’habitants, à peine plus grand que la Suisse et puis c’est tout juste trois heures de vol depuis Genève via Zürich ; Destination moyennement prisée des touristes, celle-ci fait en effet hausser les sourcils de vos amis, la surprise laissant rapidement place à l’inquiétude et parfois même à la suspicion. Pour moi la Serbie ça commence par le contrôle obligatoire à la douane en arrivant à l’aéroport Nicolas Tesla près de Belgrade. Pour celles et ceux qui ne connaissent pas Nicolas Tesla, celui-ci a servi de modèle à l’excellente fiction biographique de Jean Echenoz : Des éclairs, et comme dit John Ford : entre la vérité et la légende je choisirais toujours la légende - je préfère moi aussi m’en tenir à celle-ci, donc au roman de Jean Echenoz, un auteur que j’estime beaucoup par ailleurs… mais revenons à nos moutons, ou plutôt à nos barrières que sont nos frontières, qu’il s’agit de franchir, passage douanier obligatoire. Mon passeport est longuement étudié puisque j’y ai disposé il y a longtemps de cela une photo où j’ai franchement l’air d’un vendeur d’armes, ce qui, pour le coup, parait être un bon choix lorsqu’on se rend dans les Balkans, un avis visiblement peu partagé par mon douanier serbe qui me demande si c’est la première fois que je viens en Serbie, ce à quoi je réponds par l’affirmative. Il me souhaite ensuite welcome in Serbia, ce qui me réjouit beaucoup et me motive à répondre par un souriant remerciement en Serbe : Hvala! Quand le douanier me regarde d’un air médusé et réitère sa question, je comprends mon erreur… il ne me souhaite pas la bienvenue mais veut savoir ce que je viens faire dans son pays – why do you come in Serbia ? Tourisme et visite à des amis musiciens. Mon passeport est à nouveau longuement étudié. C’est qu’il échoue en janvier 2013 et ne possède aucun visa, de quoi décontenancer la plupart des douaniers d’Europe. Finalement mon précieux sésame m’est rendu en compagnie d’un have a good stay modérément sympathique, et, évidemment, plutôt expéditif.

Une rue de belgrade

Rentrer dans Belgrade depuis l’aéroport et par l’autoroute cela signifie avant tout traverser Novi Belgrade, ville nouvelle sortie de terre durant le vingtième siècle pour parer à l’augmentation de la population. C’est un long défilé de blocs grisâtres aux formes disparates quoique souvent étonnantes, cité moderne de type soviétique, dont le plan a, semble-t-il, été influencé par ceux de Le Corbusier. Je ne vais pas m’attarder dans la description, n’ayant pas eu l’occasion de visiter cette partie de Belgrade. Je passe en effet le pont, au-dessus de la Save, pour pénétrer dans le centre-ville. Si l’incertitude était longue et semblait permanente en traversant la nouvelle ville, l’ancienne fait l’effet d’une certitude brutale : le touriste, pour informé qu’il soit, ne pourra jamais cerner cette capitale! Ici un hôtel particulier du plus grand style, là une fabrique abandonnée, là le résultat malheureux de la politique de Milosevitch et des bombardements de l’Otan de 1999 sous la forme de bâtiments officiels éventrés dont certaines parties pendent nonchalamment dans le vide, puis des bâtiments culturels, des magasins, encore des ruines, des maisons dépouillées de toute activité humaine alors qu’elles sont si belles, et puis l’ambassade des États-Unis, reconnaissable par son drapeau bien sûr, mais surtout parce que toute ses fenêtres sont murées, transformant cette belle bâtisse en bunker discret. Il faut lire ces quelques lignes du Nobel de littérature Ivo Andric pour comprendre un tant soit peu Belgrade… 

Cette grande ville, paraît-il, a toujours été comme ça: déchirée, dispersée, comme si elle n’était jamais tangible et réelle, mais toujours en création, en restauration. D'un côté, la ville se développe et grandit et d’autre elle est fanée et ruinée. Elle est toujours émouvante et vague, jamais en repos. La paix et la tranquillité n’y existent pas. La ville de deux rivières, la grande surface,  serrée par les vents.

 

MythiqueLa capitale serbe est en somme un rébus enveloppé de mystère au sein d’une énigme, pour reprendre les mots de Winston Churchill à propos de la Russie. Cette ville n’est ni réellement accueillante, ni totalement repoussante, et il faudra plusieurs jours pour découvrir ses multiples facettes, bonnes et mauvaises. Il s’y dégage une atmosphère propice à la flânerie, à l’errance, à une forme de dérive qui fait écho au procédé des situationnistes, se définissant comme une technique du passage hâtif à travers des ambiances variées. Après avoir dérivé le flâneur finit par échouer sur la terrasse de l’un des nombreux cafés de la ville. Les bières y sont bon marché, ainsi que la nourriture, dont les célèbres cevapcici, héritées de l’empire Ottoman. Qui dit Cevap, dit restaurant Walter Sarajevo. Le nom intrigue, plus encore lorsque vous découvrez son panneau extérieur représentant un homme muni d’un fusil en joue ! Il me faudra attendre quelques jours pour en apprendre plus sur le nom de ce restaurant et son logo invraisemblable. Il s'inspire du film yougoslave très populaire de 1972 : Valter brani Sarajevo (Walter sauve Sarajevo). Inconnu (et introuvable) dans nos contrées, le film a eu un succès monumental dans la Chine communiste avec plus de 350 millions de spectateurs. Son héros – Valter – passe son temps à dégommer des soldats allemands pendant la seconde guerre mondiale. Le protagoniste a réellement existé. Mort en 1945 à Sarajevo, il est devenu l’image même de la résistance à l’occupant nazi. Le jour avant mon départ pour la Suisse je vais trouver une copie DVD de Valter brani Sarajevo et la rapporter comme souvenir de ce voyage surprenant.

à suivre ...

 

 

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