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La carte postale du jour ...

 

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plus de chauffage depuis trois jours, le temps est au beau, mais l'air est glacial ; rien de mieux pour réchauffer l'atmosphère que d'écouter mon titre préféré des Mountain Goats, "Against pollution", où John Darnielle chante "A year or so ago, I worked at a liquor store, And a guy came in, Tried to kill me so I shot him in the face, I would do it again, I would do it again. When the last days come, We shall see visions. More vivid than sunsets, Brighter than stars. We will recognize each other, And see ourselves for the first time, The way we really are." tout en relisant ce bon observateur des mœurs contemporaines, adepte de la phrase longue et qui plus talentueux langagier, Éric Laurrent : "J'étais invité le soir même à un raout privé, donné tout près de chez moi, dans un bar à la mode de la rue Oberkampf (elle-même fort en vogue depuis quelques années, ayant vu en une demi-décennie à peine, par ce phénomène de gentrification que connaissent tous les anciens quartiers ouvrier de Paris depuis le milieu des années 1950, la plupart de ses boutiques et ateliers céder la plcve à des cafés et des restaurants, essentiellement destinés à cette frange de la population œuvrant dans les secteurs émergents de l'activité économique, tels les nouvelles technologies, la publicité ou le design, et que la vulgate sociologique désigne par le terme de "bourgeoisie bohème", établissement où, dans une pénombre enfumée, bruyante de conversations et de musique émise à fort volume, de jeunes et jolies serveuses à l'accent provincial vous apportent de mauvaise grâce, tarifés aussi lourdement qu'ils sont chichement mesurés, des vins de Californie, des spiritueux slaves, des cocktails sud-américains, ainsi que, préparés par des immigrés sri-lankais dont on aperçoit dans le cadre du passe-plat les silhouettes affairées en cuisine, des mets tout ce qu'il y a de plus rustique), pour célébrer le lancement d'une revue de luxe, aujourd'hui défunte, dont la promotion de la "transversalité des cultures et des sexes" constituait la raison d'être.
Illustrant parfaitement l'assouplissement récent des codes vestimentaires en vigueur jusque-là, lequel se traduisait par l'ennoblissement de nippes ressortissant au plus grand négligé, ainsi que par leur association, que l'on eût tenue naguère encore pour une faute de goût, avec des éléments très habillés pour eux, telle que celle d'une robe fourreau et de chaussures de sport, d'un smoking et de brodequins, d'un tailleur et de tongs, d'une bleu de chauffe et de souliers à boucle, d'un jogging et de bottines vernies, d'un jean baggy et d'escarpins, d'une jupe au genou droite et de collants résille, d'un blouson de motocycliste et d'une chemise à jabot, d'un sweat-shirt à capuche et d'un pantalon à pinces, ou bien encore d'un chemisier et d'un paréo, d'un maillot de peau à bretelles et d'une cravate, d'un tee-shirt et d'une jaquette, d'un battle-dress et d'un caraco, se doublant en prime (cet assouplissement des codes vestimentaires, donc) d'un relâchement très net des règles de la bienséance, lesquelles semblaient désormais autoriser l'exhibition des nombrils, la monstrations des soutiens-gorge (dont on distinguait les bonnets et bretelles sous des débardeurs en tricot, aux mailles très ajourées, ou des tuniques de tulle à demi transparentes), voire des petites culottes, des slips et des caleçons (dont on surprenait la bordure de dentelle ou le galon élastique au creux de nombreux reins), ainsi que le port de jeans sales, pour ne pas dire crasseux, le fussent-ils artificiellement, ou de pantalons oversized, qui bâillaient sous les fesses et s'affaissaient en accordéon sur les chevilles, jusqu'à trainer par terre, deux cent personnes environ se pressaient là, sous la grande et haute verrière, aux carreaux translucides, tavelés de rouille et de lichens, de cet ancien atelier de métallurgie, dans une atmosphère appesantie et moite par la perspiration des chairs promiscues et les vapeurs alcoolisées des eaux de toilette et des haleines."

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