Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

littérature - Page 2

  • La carte postale du jour ...

    samedi 1 février 2014.jpg

    avec Amiina et cet album intitulé Puzzle, sophistication et épure se marie dans un style qui est unique car il est le leur, bricolage de génie, virevoltant. Je retrouve cela avec Chevillard et son abécédaire où les mots rares et la phrase longue serve la cause de la singularité littéraire :"aussi étonnant que cela paraisse, la fantaisie, la folie, une forme de baroque s'épanouissent mieux dans les miniatures. La vie même n'est pas la somme de nos faits et gestes (ces os brandis), de nos grands emportements spectaculaires, elle est d'abord constituée d'atomes, de cellules, de molécules. Une phrase ramassée comme celle de Ramón Gómez de la Serna - par exemple la main est une pieuvre qui cherche un trésor au fond des mers - se déploie dans les têtes pensives, invite au voyage mieux que les milles pages où tout est dit, confisqué, verrouillé comme le monde même, sans issue.
    Je voudrais aussi que l'on cesse de confondre le raffinement de la forme et le maniérisme qui, lui, en effet, est toujours ridicule. Mais certains s'imaginent encore qu'un bloc de pages mal dégrossi arraché au réel par une brute vaudra toujours mieux que la minutieuse intervention du lettré, comme si ce dernier ne connaissait jamais du monde que les boiseries de son cabinet. Comme s'il existait encore des cabinets en boiseries ! Comme si la subtilité était un vice de l'intelligence ! J'aime citer cette remarque de Gombrowicz qui à mon sens règle la question : "Tout ce qui est pur en fait de style est élaboré". Sachant que cette sophistication qui est un autre nom du style peut être dans le tour d'esprit de l'écrivain et sa phrase, par conséquent, sortir tout faite de sa fabrication prodigieuse, immédiatement juste."

  • 14, de Jean Echenoz, aux éditions de Minuit ...

    jean_echenoz_14.jpg"Cinq hommes sont partis à la guerre, une femme attend le retour de deux d'entre eux. Reste à savoir s'ils vont revenir. Quand. Et dans quel état".


    C'est un peu le Voyage au bout de la nuit* de Vies minuscules** aux Champs d'Honneur*** avant Un long dimanche de fiançailles****. C'est surtout la prose astucieuse et lumineuse de Jean Echenoz qui mêle les destins de quelques protagonistes à la grande histoire, et surtout : à la Grande Guerre. Tout y passe : le vin offert aux soldats pour développer leur esprit de bravoure. Ces mêmes soldats qu'on va chercher dans les couches basses de la société. Et puis c'est la mise en lumière des divers fronts : celui de devant, l'ennemi, allemand, du milieu, les poux, l'odeur, insoutenable, et celui de l'arrière avec ses gendarmes dont il ne faut pas attendre plus d'humanité. Lire 14 c'est avoir une succession d'images, de descriptions, et pas seulement de la guerre, mais de ce qui se passe dans la guerre, et autour d'elle, ses conséquences sur l'économie, les femmes, les amants aussi. 14 est une subtile collection de destins broyés dans un opéra démentiel aux flatulences apocalyptiques. Avec ses 124 pages ce nouveau roman de Jean Echenoz pourrait sembler petit, il est pourtant le plus grand de cette rentrée littéraire.


    * Céline ** Pierre Michon *** Jean Rouaud **** Japrisot