Une merveille de tricotage artisanal, que cela soit pour l'univers enchanteur des quatre islandaises d'Amiina, ou de celui - littéraire - de l'écrivain suisse Julien Maret, et son très beau second roman qui vient à peine de paraître chez Corti, et dans lequel je m'absorbe volontiers, tant ses descriptions tout en délicatesse sont exquises : "plus bas après le jardin de la mère Soret ; il y avait la menuiserie aux grandes portes ; parfois laissées ouvertes ; avec le vacarme des scies circulaires ; le fatras des bois coupés ; des plots à joncher le sol des restes de papier de verre ; avec l'insistance des ponceuses dans la poussière ; dans le brouillard dans la montagne ; avec l'éreintement des rabots des coups de varlope ; des entailles des encoches ; au milieu des copeaux balayés dans le coin ; et puis aussi ce long tube en toile de jute ; qui aspirait la sciure ; et dans lequel on voulait sauter dedans à pieds joints ; ça avait l'air doux et cotonneux c'était attirant ; il y avait encore les crayons rouges aplatis à courir en long en large ; à prendre les mesures pour les découpes ; avec le double-mètre qui perdait le vernis par endroits les chiffres effacés ; mais il y avait toujours quelqu'un à venir dehors ; le casque sur les oreilles pour venir fumer une cigarette ; qu'on avait rien à faire ici ; que ce n'était pas un lieu pour les enfants ; qu'il fallait loin de par là ; et c'était à s'enfiler entre les planches empilées ; en enfilade sur la place ; recouvertes de plaques de tôle ondulée ; écornées dans les coins des bouts déchirés ; à travers les couloirs en se frottant au bois ; en se prenant des échardes au passage le doigt dans la bouche ; jusqu'au fond dans les replis ; dans les cachettes assis sur de la vieille sciure empâtée ; à trafiquer en sourdine ; à tripoter une capsule de bière ; à rattacher les lacets de ses chaussures ; et puis à graver ses initiales sur les planches ; avec le petit couteau porte-clé ; celui avec le cure-dent et la pince à épiler sur les côtés ; le dos contre le mur loin des regards et loin du monde ;"