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paris

  • La carte postale du jour ...

     

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    si 1984 évoque Orwell, c'est aussi l'année où disparurent Henri Michaux, François Truffaut et Julio Cortázar dont je découvre la tombe dans ce beau livre de Cees Nooteboom : Tumbas, l'équivalent des "tombeaux" en musique. "Le lecteur devant la tombe de son poète, voit ce que nul autre ne voit" écrit l'écrivain hollandais, alors que Guidon Kremer, dont l'interprétation avec la Kremerata Baltica de "Darf Ich..." d'Arvo Pärt me transporte, disait pour sa part "...Words irritate. Gestures mislead. Emotions dissolve. Only sounds speak a language that might be understood. If one open the heart, would there be someone receptive enough ? But who is listening ? Who is able to feel it ? Often i do ask myslef, where does heartbreak identical to mine exist ? And the attempt of an answer is : out there, on the other end of my own sound". Et il est beau de lire ces lignes sur Cortazar et sa compagne Carol Dunlop de la plume de Nooteboom, à propos du livre "Les autonautes de la cosmoroute ou un voyage intemporel Paris-Marseille" :

    "Les dernières photos du livre sont celles de leur arrivée, "épuisés, mais vainqueurs". "Ce fut, écrit-il dans sa postface, un jeu pour l'Oursine et le Loup, et ce fut le cas pendant trente-trois jours fantastiques." Puis vient le post-scriptum de 1982 : "Lecteur, tu le sais peut-être déjà, Julio, le Loup, finit et compose seul ce livre qui fut vécu et écrit par l'Oursine et par lui, comme un pianiste joue une sonate, les mains unies dans un même souci de rythme et de mélodie." Il dit qu'après leur retour, ils ont repris leur "vie militante" et sont parti au Nicaragua pour participer à la lutte de "Ce petit peuple qui, infatigablement, poursuit sa route vers la dignité et la liberté". Puis ils rentrèrent à Paris, pleins de projets : finir leur livre et céder leurs droits d'auteur au peuple du Nicaragua. Deux mois plus tard elle entreprenait ce voyage solitaire "où, dit-il, je ne pouvais plus l'accompagner, et le 2 novembre elle s'échappa d'entre mes mains comme un filet d'eau, sans accepter encore que les démons aient le dernier mot". Sur la dernière page, un dessin gracile, avec une route qui monte vers les nuages, un minibus Volkswagen ailé, et tout en haut, du côté du soleil et du ciel, quelque chose qui doit être un ange."

  • La carte postale du jour ...

    lundi 30 décembre 2013.jpg

    Cover without a record est une œuvre de João Paulo Feliciano, qui est un clin d’œil à celle de Christian Marclay qui s'intitulait Record without a cover, qui, comme son nom l'indique, consistait en un disque sans pochette, alors qu'ici il s'agit bien d'une pochette sans disque. Et ce vide (ou ces possibilités infinies) colle parfaitement avec ma dernière lecture de l'année, à savoir La conjuration de Philippe Vasset, dont le protagoniste cherche le vide, l'inutile, la ruine dans la ville... et j'aime beaucoup ce passage : "La tête pleine d'images de ruines et de désastre, je me suis arrêté, juste avant la sortie, devant un local retraçant l'histoire du centre. Parmi les photographies et les plans, l'architecte Antoine Grumbach ("marchand de ville", comme il se qualifiait lui-même dans un film diffusé en boucle) avait exposé quelque livres dont la lecture avait supposément inspiré la conception du Millénaire. Parmi ces ouvrages figuraient Molloy de Beckett, Ulysse de Joyce et Je me souviens de Perec. Le visiteur était censé comprendre que l'implantation du Millénaire à Aubervilliers participait de la création contemporaine la plus radicale. Que, bien sûr, c'était un espace d'achat, mais que c'était tellement plus que cela : un laboratoire pour la ville de demain, un jalon dans l'histoire de l'architecture durable, bref, une véritable fresque, presque une vision généreusement offerte aux regards des consommateurs venus remplir leur réfrigérateur ou s'équiper en électroménager.
    Ainsi, non seulement on m'avait chassé de ma retraite favorite pour construire un centre commercial, mais on avait poussé le vice jusqu'à le faire au nom d'écrivains que j'aimais (la référence à Georges Perec, que je vénère, n'était ni plus ni moins qu'un affront personnel caractérisé). Une colère froide me submergea et je me mis à gribouiller, rageur, des commentaires hostiles, voire franchement insultants, sur le cahier destiné à recueillir les remarques des visiteurs.
    En proie à une fureur allant sans cesse croissant, je rêvais d'une bombe cadastrale qui saurait détruire l'ordonnance de Paris et rendre la ville à l'inconnu. J'appelais sur les façades trop propres du Millénaire à une guerre sourde, à un conflit sans nom capable d'étoiler ces baies vitrées et ces dallages vernissés. Mais, dans Paris caserné, aucun orage ne s'amoncelait jamais sur l'horizon du bâti. incessamment balayées par les caméras et les signaux GPS, les rues étaient vides de tout désordre, et personne n'essayait de forcer un passage dans les défenses de la ville."