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La carte postale du jour...

"En art, il faut croire avant d'y aller voir" - Léon-Paul Fargue

 

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Je me souviens d'avoir longtemps considéré cet album du groupe de Michael Gira comme la perfection même alors que sortaient, en cette année 1999, d'autres disques fantastiques comme Anthems from the pleasure park de Backworld, Music to play in the dark de Coil, Eye of the hunter de Brendan Perry ; l'apocalypse aurait pu arriver en cette fin d'année que je n'en aurais pas été moins heureux.
Je me souviens d'avoir découvert avec un peu de retard que Julia Kent jouait du violoncelle sur cet album, ce qui a renforcé mon admiration pour ce disque d'Angels of Light et pour cette musicienne admirable.
Je me souviens d'un concert de Michael Gira à l'Usine de Genève en octobre 2007, très intimiste, de ma rencontre avec cet homme fort sympathique à qui j'ai offert un CD (celui de Julia Kent), de l'ambiance enthousiaste ce soir là, tout ça et plus encore revient à moi quand j'écoute les premières mesures de ce magnifique New Mother, et lorsqu'arrive la voix profonde de Michael Gira sur le titre Praise your name :

Where are you wounded girls with
 bruised faces and blackened eyes?
 Break open your glass doors
 and welcome the whirling debris.
 Carve your name there
 in the marble and concrete.

Sheila aussi est une fille blessée. Dans ce roman qui sort le 21 août prochain, Sheila Hieti use et abuse - mais dans le bon sens du terme pour peu que cela soit possible - de l'autofiction pour brosser le portrait d'une jeune génération d'artistes qui court après la vie, la notoriété, l'amour. De Toronto à Miami en passant par Paris et New-York, voilà bien une sympathique comédie écrite dans un style relâché oscillant entre les confessions, le journal intime, la pièce de théâtre (excellents dialogues!) et parfois même l'essai sur l'art. Une écrivaine attanchante aux faux airs de Suzanne Vega croisée avec Beth Gibbons, qui ne cache pas son jeu, pour un livre qui ne s'adresse pas uniquement aux trentenaires amateurs d'art et aux hypsters, quoique... :

"Je reconsidérais toujours mes décisions, changeais toujours d'avis. Je retournais sur le mauvais chemin, puis me lançais sur celui don't j'espérais qu'il fut le bon. Le destin devenait un parent opaque, exigeant, peu communicatif, et j'étais son enfant, essayant toujours de lui plaire, de deviner ses attentes. J'essayais de trouver sur son visage des indices pour comprendre l'attitude qu'il attendait  de moi. Dans tout ça, une question plus générale ne quittait jamais mon esprit, une problématique en cours qui ne serait jamais résolue, même si j'espérais qu'elle le fut un jour : quelle était la bonne façon de réagir face aux gens ? À qui devrais-je adresser la parole en soirée ? Comment fallait-il que je sois ?
 Mais en guise de réponse, l'univers ne me donna aucun signe clair. Cela ne m'empêcha pas de chercher, ou de croire que le monde était porteur de réponse. C'est ainsi, en un sens, que je passais tout mon temps, car comment faire autrement pour être aimée de l'univers ? Si je m'y prenais mal, je perdrais sûrement toutes ses faveurs, toute sa protection - comme si l'univers était enchanté que j'adopte un certain type de comportement."
 

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